L'art
fagot ou la délinquance du format :
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- Sans titre,
Huile et acrylique
2000,
190 x 105 cm
Plasticien
ivoirien, Alain Dagry créée l'art qu'il dénomme
" art fagot ".
Sous l'emprise du désir de rénover le support, Alain
utilise les branches d'arbre comme châssis et reconstitue le
support avec ses matières qu'il trouve, colle, plâtre
ou coud.
Alain
entre dans ce qui l'appelle dans " une délinquance du
format " : même lorsque le châssis est géométrique,
il n'est pas rigide car c'est du bois au naturel.
Les installations
d'artiste comme Sarkis m'ont marqué. Je détruis châssis
et support traditionnels et tente de les reconstituer créant
l'équilibre quelque part, ailleurs ...
L'émotion
d'âme africaine :
Je peins
sous l'emprise de l'émotion des couleurs, des formes et de
la matière, travaille avec ce que je trouve, sans chercher
à représenter des symboles africains.
Le " fagot " amène une âme africaine à
ce que je fais, rend évidemment mes uvres très
africaines.
Par mon écriture, des formes plastiques, une attitude par rapport
à la matière, involontairement, inconsciemment transparaît
dans mon travail des matériaux, des formes telles les masques,
des architectures
propres au continent africain.
Le
métissage :
Je récupère ce que je peux de l'occident et de l'Afrique.
Je véhicule et encourage le métissage, dans l'optique,
dans l'idée de créer un nouvel élan à
la représentation mentale de l'Afrique.
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- Sans titre,
Huile et acrylique
- Ficelle, bois,
collage et corde
2001,
110 x 76 cm
Dans
la représentation mentale actuelle, ce qui me dérange
le plus c'est le mimétisme des hommes des grandes villes africaines,
dites " modernes ".
L'homme de ces grandes villes porte une veste : tous mettent une veste,
car tous copient l'Occident.
Les
artistes du monde :
Je me
moque de l'art contemporain africain.
Je veux faire partie des artistes du monde. D'ailleurs mon travail
peut aussi faire penser aux tipis indiens.
La
création, le discours, l'âme magique :
Je créée
sans me poser la question de l'évolution de mon travail.
La création est pour moi un besoin spirituel.
Je ne
me soucie ni de discours ni de sens.
Le discours tue la pensée. Pour cela, la plupart de mes uvres
ne sont pas titrées.
L'académisme ambiant que j'ai subi pendant mes études
faisait prévaloir le discours, discours donnant une âme
magique à l'uvre.
Mais
pour moi, l'oeuvre parle d'elle même : l'âme magique ressort
de l'uvre sans besoin d'un discours, sur ce continent où
le silence, un geste, un regard, une attitude a son éloquence.
Je laisse
l'il du spectateur juger de mon uvre, le laissant voyager
au gré de son imagination
Un
concept :
En revanche,
je véhicule un concept
L'art
Fagot procède du " n'zassa " qui en langue agnié
( tribu Akan ) désigne le comportement du pauvre dans la société
moderne qui récupère des chutes de tissus et les coud
pour en faire des chemises ou des pantalons, sorte de tenue d'Arlequin.
En Côte
d'Ivoire ce comportement est devenu une mode vestimentaire qui est
encore au goût du jour, mode à l'opposé du phénomène
de mimétisme de l'homme des grandes villes auquel j'ai fait
allusion.
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- Sans titre,
Huile et acrylique -
Plastique, peau,
toile, bois et ficelle
2001,
85 x 85 cm
L'accrochage
:
Mes uvres
ne s'accrochent pas nécessairement. Il y a toujours un mouvement
qui fait sortir la toile du mur comme un bas relief.
Propos recueillis par Sylvie Le Gall à Abidjan, octobre 2001
Un
résumé en quelques mots
Une
spontaneïté :
Alain
peint sous l'émotion des couleurs, des formes plastiques et
de la matière, travaille ( colle, plâtre ou coud ) avec
ce qu'il trouve, à l'image du comportement dénommé
" n'zassa " du pauvre dans la société moderne
africaine qui récupère des chutes de tissus et les coud
pour en faire des chemises ou des pantalons, sorte de tenue d'Arlequin
Il véhicule
et encourage le métissage, dans l'optique de l'idée
de créer un nouvel élan à la représentation
mentale de l'Afrique qui balaierait sur son passage le mimétisme
des africains des grandes villes qui tend à imiter l'Occident
en s'habillant en costume - cravate par exemple.
Une
représentation inconsciemment africaine :
Il ne
cherche pas à représenter des symboles africains mais
le bois naturel, le " fagot " qu'il utilise comme châssis
amène une âme africaine à ce qu'il fait, rend
évidemment ses uvres très africaines.
Par son
écriture, des formes plastiques, une attitude par rapport à
la matière, involontairement, inconsciemment transparaît
dans son travail les matériaux, les formes telles les masques,
les architectures
propres au continent africain.
L'âme
magique :
Pour
l'artiste, l'oeuvre parle d'elle même : l'âme magique
ressort de l'uvre sans besoin d'un discours, sur ce continent
où le silence, un geste, un regard, une attitude a son éloquence.
Voir
le site d'Alain Dagry : http://www.aaars.org/dagry.htm