Nomadisme culturel :
Interview de Ibrahima Kebe - Juillet 2002

Sommaire de l'interview :

Un artiste est né
Expression humaine et harmonie des couleurs
Le long cou
Un discours sur l'humain


Un artiste est né :

Déjà en bas âge, Ibrahima créait.

Il vivait à Kaolack et au collège il manifesta son désir de suivre une éducation artistique.
Son frère aîné avait déjà tracé la voie : il étudiait aux Beaux-Arts à Paris. Son père aurait préféré pour son cadet des études plus " sérieuses " et par exemple une carrière de magistrat.

Ibrahima insiste et sera auditeur libre pendant deux ans apprenant le dessin, la peinture et les arts décoratifs. Au terme de ces deux années, il suivra l'atelier de recherche plastique dirigé par Pierre Lods.

Après une première exposition, Ibrahima embrasse la carrière d'enseignant. Mais l'art est pour lui un goût. Il veut progresser dans sa carrière artistique. Son père le soutient alors. Et c'est à ce moment là, à 28 ans, libéré, qu'Ibrahima a vraiment l'audace d'entrer dans le milieu artistique.


Expression humaine et harmonie des couleurs :

Mon apprentissage, mes recherches sur l'expression humaine, je les commençais avec des cachets de pomme de terre. Je créais des figures, que je coloriais à la fin.
Pierre Lods notera chez Ibrahima dès le début : " un goût perceptible pour l'harmonie des couleurs".

Je savais créer une atmosphère, des tonalités différentes à partir d'une même couleur, des dégradés colorés tout en utilisant le noir et le blanc.


Le long cou :

Au cours d'un workshop de deux semaines, Ibrahima est amené à utiliser du papier kraft : support plus long que large. Ces personnages aux longs cous sont issus de cette expérience.

Le long cou est un signe d'élégance, de royauté, de noblesse …
Ici, en Afrique, l'individu aime se faire remarquer. L'individu mute en quelque sorte : il s'aménage un rôle, une personnalité faîte d'apparences.
Mes personnages mutent ainsi, essayent d'acquérir des lettres de noblesse … C'est un discours sur le faux et le vrai chez l'être humain, à la noblesse que je mets en rapport avec la psychologie.


Un discours sur l'humain :

Les personnages d'Ibrahima ont un regard heureux. Ils sont chargés d'émotion.
Sous une communion apparente, derrière ce regard heureux, plus de psychologie amènera à trouver derrière ces personnages des ombres …

Ibrahima a un discours universel, manichéen, sur le vrai et le faux, le bien et le mal.

Notre culture africaine traditionnelle se limite à une certaine réflexion sur le bien et le mal. Elle condamne le mal sans le reconnaître ne donnant le droit de voir le mal que pour aller vers le bien.

Ibrahima a travaillé également sur le métissage et cela pendant plusieurs années.
Intéressé par ses teints en tant qu'artiste, Ibrahima dit constater que chez les couples mixtes les couleurs de peau changent : le noir devient plus blanc et inversement. Les enfants eux prennent des caractères chez les deux parents.

Propos recueillis par : Sylvie Le Gall à Dakar ( Sénégal ) - Juillet 2002


Illustrations de la page : Oeuvres d'Ibrahima Kebe
- Photographies de Sylvie Le Gall

Photo 1 / "La fille et le pagne"


Acrylique sur toile
125 x 100 cm

Photo 2 / "Retrouvaille"
2000
Acrylique sur toile
100 x 160 cm


Pour en savoir plus sur l'artiste :

Le Curriculum Arte

La présentation lors de l'exposition " Portraits du Sénégal" de Ars Ante Africa

La présentation lors de l'accrochage " One day in the life of Africa " de Ars Ante Africa

   

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